
Par Iman Alaoui/ ALDAR
La descente de la Génération Z dans les rues pour exprimer sa colère face aux conditions sociales et économiques soulève de profondes interrogations sur les acteurs qui ont poussé cette jeunesse, encore en quête d’identité et d’avenir, à manifester dans un contexte particulièrement sensible.
Sur le plan factuel, nul ne peut nier que les revendications des jeunes trouvent leur origine dans des frustrations accumulées : chômage, cherté de la vie, sentiment de marginalisation et perte de confiance dans les institutions traditionnelles. Mais le passage de cette colère diffuse à un mouvement de contestation ouvert, dépourvu de cadre ou de leadership, l’a rendu vulnérable aux dérives et aux infiltrations. Ce que l’on a pu constater avec l’apparition de groupes criminels infiltrés profitant des manifestations pour commettre des actes de vandalisme, de pillage et d’agression.
Le plus préoccupant demeure la tentative de certains acteurs, internes comme externes, de surfer sur cette vague de colère juvénile et de la manipuler à travers les réseaux sociaux, exploitant l’ardeur des adolescents et des très jeunes manifestants, souvent dépourvus d’expérience politique et de conscience des risques liés à l’affrontement avec l’État. D’où la problématique : si les jeunes ont le droit légitime d’exprimer pacifiquement leurs revendications, il est tout aussi impératif de les protéger contre toute instrumentalisation politique ou géopolitique.
Dans ce contexte, les élites politiques et partisanes portent une lourde responsabilité. Elles ont laissé un vide béant dans la médiation entre l’État et la société. Plutôt que de proposer des programmes audacieux répondant aux attentes des nouvelles générations, elles se sont contentées de discours généraux et stériles, incapables de convaincre une jeunesse confrontée chaque jour à la difficulté de décrocher un emploi digne ou un enseignement de qualité.
L’État, lui aussi, doit reconnaître qu’une approche strictement sécuritaire ne suffira pas à contenir la crise. Seule une stratégie globale, combinant dialogue politique, réformes économiques et restauration de la confiance dans les institutions, peut offrir une réponse durable.
Le roi Mohammed VI, garant de l’unité et de la stabilité du pays, demeure l’acteur central capable de piloter cette dynamique réformatrice grâce à son autorité et à sa légitimité historique. Mais la réussite de tout projet d’ouverture dépendra de la volonté réelle des autres acteurs de s’y engager sérieusement, en dépassant les calculs étroits.
La Génération Z n’est pas l’ennemie de la nation : elle en est l’avenir. Mais la laisser sans perspectives ni encadrement, puis se défausser de sa responsabilité après avoir attisé sa colère, représente un danger aggravé.
Aujourd’hui, l’équation est limpide : soit transformer l’énergie de cette jeunesse en moteur de changement positif à travers des réformes authentiques, soit l’abandonner aux aventures chaotiques, dont les seuls bénéficiaires seraient les ennemis de l’intérieur et de l’extérieur.