La résistance marocaine à la présence portugaise à Doukkala a été le thème d’une rencontre, animée mercredi soir, par le Pr. Jilali Derif au siège du musée de la résistance, dans laquelle il s’est arrêté sur la période qui a présidé au départ des Portugais de la ville de Mazagan.
Après une domination de 260 ans, la garnison et les habitants portugais de Mazagan, dernière enclave portugaise située sur la côte atlantique marocaine, étaient obligés, à l’aube d’un samedi 11 mars 1769, à évacuer définitivement la forteresse, a d’emblée rappelé Pr. Derif, mettant en exergue cette glorieuse page de l’histoire de Mazagan, marquée par le grand siège de la ville fortifiée, mené par le Roi Sidi Mohamed Ben Abdellah.
Le Maroc et le Portugal partagent un passé commun depuis l’antiquité, « mais avec des influences mutuelles évidentes pendant plusieurs centaines d’années », a souligné Pr. Derif dans une déclaration à la MAP, en marge de cette rencontre initiée par la Direction du Haut-Commissariat aux Anciens Résistants à El Jadida, en collaboration avec l’Association Doukkala Mémoire pour la préservation du Patrimoine.
Soulignant l’intérêt que donnent, ces dernières années, des écrivains et chercheurs portugais et marocains à la mémoire historique maroco-portugaise, Pr. Derif a précisé que les limites historiques de la région des Doukkala s’étendaient de l’Oum Erbia (Azemmour) à Tensift (Aguz ou Souiria kdima), et que la résistance à la colonisation de Mazighane et son port naturel (Baie d’El Haouzia) s’était notamment déroulé à l’époque des gouverneurs Jorge de Mello en 1505, et Joao de Meneses en 1508.
Le conférencier a distingué, par la suite, entre les différentes étapes de la colonisation de Safi en 1508, puis Mazighane et Azemmour en septembre 1513 jusqu’au mois de décembre 1541 où les Portugais avaient quitté ces villes.
Cette période était marquée, a-t-il expliqué, par des razzias que les Portugais menaient sur les villages des Doukkala afin de soumettre leurs habitants. “Ces razzias ne passaient pas sans victimes et prisonniers parmi les Portugais », a noté le conférencier, citant la guerre de Boulaouane (11 avril 1514), et la guerre des Oulad Amrane (19 mai 1516) où le gouverneur de Safi, Nuno Fernandez d’Ataide, a été tué par le caïd des Oulad Amrane, Benchahmout.
Cette phase fut marquée aussi par le siège de Safi par Moulay Ahmed Laaraj pendant six mois en 1534, a rappelé l’intervenant.
Pr Derif s’est également arrêté sur la période fatidique de 1536, quand Joao III, roi du Portugal, décide de construire une forteresse à Mazagan (Cap) est abandonne Safi et Azemmour.
Revenant sur la période allant de la construction de la forteresse de Mazagan jusqu’au siège de 1562, le conférencier a cité des ouvrages, des correspondances et un manuscrit qui mettent la lumière sur la défaite de Luiz de Loureiro (gouverneur de Mazagan) après l’attaque des troupes de Moulay Mohamed Cheikh.
Quant aux évènements du siège de Mazagan en 1562 mené par le prince Mohammed, fils de Moulay Abdallah, Pr Derif a indiqué qu’ils sont relatés dans plusieurs ouvrages aussi bien en portugais qu’en arabe. Un siège où les Marocains avaient utilisé 20 canons de diverses dimensions et des mines, a-t-il précisé.
Pr Derif a expliqué que pour la période allant du siège de 1562 à celui de 1769 (Libération de Mazagan), plusieurs publications donnent des informations précises sur Mazagan (Regimento de Mazagan) et la toponymie de ses environs, les stratégies de guerre entre les Portugais et les citoyens d’Azemmour, d’Oulad Bouaziz et d’Oulad Frej.
Concernant le siège de 1769 mené par les Marocains et qui a conclu au départ définitif des Portugais, le conférencier, s’appuyant sur un ensemble de cartes et de publications, a souligné l’efficacité de la stratégie marocaine utilisant la technique d’approche de la forteresse pour affronter les Portugais barricadés derrière les fortes murailles et les bastions.
Des intervenants ont, par ailleurs, évoqué le problème du manque flagrant d’archives locales, et l’absence d’un centre documentaire susceptible de mettre la documentation sur la présence portugaise à El Jadida et aux Doukkala en général à la disposition des chercheurs et des étudiants.
Il a été également remarqué que ce genre d’initiatives personnelles et privées de chercheurs indépendants restent indispensables pour combler le vide constaté en matière de recherche historique et de terrain.
ALdar : LAMAP