
Par Imane Alaoui/ ALDAR
Le Maroc s’apprête à donner, en août prochain, le coup d’envoi officiel des travaux du premier tronçon du gazoduc Maroc-Nigéria, l’un des projets énergétiques transfrontaliers les plus emblématiques du XXIe siècle.
Ce premier segment, qui reliera le port méditerranéen de Nador à la ville de Dakhla dans les provinces du sud du Royaume, mobilisera un investissement colossal estimé à près de 6 milliards de dollars. Cela reflète l’importance stratégique, tant politique qu’économique, que le Maroc et ses partenaires accordent à ce projet continental ambitieux.
Le gazoduc Maroc-Nigéria a vu le jour en 2016, fruit d’une proposition conjointe entre le roi Mohammed VI et l’ancien président nigérian Muhammadu Buhari. Depuis, il est devenu une initiative stratégique bénéficiant d’un large soutien politique et économique de la part des pays d’Afrique de l’Ouest, ainsi que des organisations régionales et internationales engagées dans les domaines de l’énergie et du développement.
À terme, ce gazoduc s’étendra sur plus de 5 600 kilomètres, reliant les champs gaziers du Nigéria à la façade atlantique marocaine. Il traversera 11 pays d’Afrique de l’Ouest, dont le Bénin, le Togo, le Ghana, la Côte d’Ivoire, le Libéria, la Guinée, la Guinée-Bissau, la Gambie, le Sénégal et la Mauritanie.
Mais ce projet ne se limite pas au simple transport de gaz. Il constitue une plateforme stratégique pour l’intégration régionale, en posant les bases d’un réseau d’infrastructures interconnectées capable de renforcer la sécurité énergétique du continent et de réduire sa dépendance aux importations.
Des économistes estiment que le projet représente une avancée majeure pour le marché gazier africain, en offrant aux pays partenaires un accès plus stable à l’énergie et en stimulant des projets industriels, électriques et agricoles, notamment dans les régions qui souffrent encore d’un accès limité à l’énergie.
Sur le plan géopolitique, ce gazoduc renforcera la position du Maroc en tant que hub énergétique stratégique entre l’Afrique et l’Europe, tout en lui conférant un rôle de premier plan dans l’architecture énergétique du continent. Le projet arrive dans un contexte mondial marqué par des tensions croissantes autour de la sécurité énergétique, ce qui rend la création de corridors sûrs et fiables entre le Sud et le Nord plus urgente que jamais.
Pour le Nigéria, détenteur des plus grandes réserves de gaz naturel du continent africain, ce projet ouvre des perspectives inédites d’exportation vers les marchés européens via le Maroc, notamment face à la diminution progressive de la dépendance de l’Europe au gaz russe.
Malgré l’enthousiasme que suscite le projet, des défis logistiques et financiers persistent. Des institutions financières internationales telles que la Banque islamique de développement et la Banque africaine de développement, ainsi que des partenaires de l’Union européenne, sont attendus pour contribuer au financement des phases ultérieures du projet.
La mise en œuvre bénéficiera également du recours aux technologies avancées et à l’expertise d’ingénierie internationale, indispensables pour surmonter les difficultés liées aux terrains complexes, tant maritimes que terrestres, traversés par le tracé du gazoduc.
Le gazoduc Maroc-Nigéria n’est donc pas un simple conduit énergétique, mais une vision africaine renouvelée du développement et de l’intégration, portée par une volonté politique forte, traduite en chiffres, en investissements et en projets concrets. C’est une étape vers une Afrique plus unie, sur les plans énergétique et économique, guidée par un leadership maroco-nigérian tourné résolument vers l’avenir.