
ALDAR / Analyse
Le quotidien espagnol La Vanguardia a révélé, sur la base de rapports de renseignement précis, des informations préoccupantes selon lesquelles plusieurs Sahraouis nés dans les camps de Tindouf, situés dans le sud-ouest de l’Algérie sous le contrôle du Front Polisario, sont devenus des cadres influents au sein de groupes extrémistes opérant dans la région du Sahel, notamment l’organisation dite “État islamique”. Ces individus, maîtrisant l’arabe, le français et l’espagnol, dirigent désormais des cellules jihadistes actives au Mali, au Niger et au Burkina Faso. Ils auraient bénéficié d’un encadrement idéologique dans des camps de réfugiés devenus, depuis plusieurs années, hors de portée d’une surveillance internationale efficace, protégés par une souveraineté algérienne qui rejette tout contrôle indépendant ou évaluation transparente.
Selon des experts en sécurité, un fait particulièrement inquiétant réside dans le profil de ces jihadistes : beaucoup d’entre eux ont participé à des programmes d’échange culturel en Europe, notamment en Espagne. Cela leur a permis d’acquérir une aisance linguistique et une connaissance des sociétés européennes, facilitant ainsi leur mobilité et leur capacité à structurer des réseaux de recrutement à l’intérieur même du continent. À titre d’exemple, on cite le cas d’Adnan Abou Walid al-Sahraoui, ancien cadre du Polisario devenu l’un des chefs les plus redoutés de Daech au Sahel avant d’être neutralisé par une opération française.
Le lien établi par les services de renseignement espagnols entre l’engagement initial de ces individus dans le séparatisme sahraoui et leur basculement ultérieur dans l’extrémisme violent souligne une crise structurelle plus profonde dans les mécanismes politiques et sécuritaires des camps de Tindouf. Au fil du temps, ces camps ont cessé d’être des refuges temporaires pour devenir des zones isolées de tout contrôle effectif, où se nourrissent à la fois les discours séparatistes et les idéologies radicales, dans un contexte d’impunité ou de laxisme apparent de l’État algérien.
Cette situation ne représente pas seulement un danger pour la stabilité fragile des pays du Sahel, mais elle constitue également une menace croissante pour la sécurité européenne, particulièrement face aux risques d’infiltration de ces éléments via les routes migratoires clandestines ou leur implication directe dans des actes terroristes transfrontaliers. En parallèle, des analystes mettent en avant le rôle stratégique que pourrait jouer le Maroc, partenaire de premier plan dans le domaine du renseignement avec de nombreux pays européens, en renforçant l’échange d’informations et la coopération sécuritaire.
Ces révélations remettent au centre du débat la responsabilité de l’Algérie en tant que pays hôte des camps de Tindouf. Elles soulèvent des interrogations sérieuses sur l’absence de recensement officiel de la population, le manque de supervision onusienne directe, et la perméabilité des jeunes réfugiés à des idéologies extrémistes dans un environnement marqué par la marginalisation et le repli. À défaut d’une réponse claire et structurée, le risque de voir émerger, dans les années à venir, une nouvelle génération de chefs jihadistes issus de Tindouf demeure réel, avec toutes les conséquences sécuritaires et géopolitiques que cela implique pour la région et au-delà.