Le recours des entreprises à la médiation ou cette pratique amiable de prévention et de résolution des conflits commence à se faire sentir au Maroc. Entre maîtrise des coûts, confidentialité et célérité, le choix s’oriente très rapidement vers ce mode alternatif de règlement des différends.
Aujourd’hui, la médiation se développe de plus en plus dans le pays. De nombreuses actions ont été menées dans ce sens, notamment la promulgation de la Loi 08-05 qui a introduit un nouveau cadre législatif définissant les modalités de recours à cette procédure comme mode alternatif de règlement de conflits, d’autant plus que cette législation s’inscrit dans le cadre des vastes réformes du droit des affaires engagées au Maroc.
En vertu de ce contexte législatif très favorable, toutes les garanties sont offertes pour permettre aux médiateurs de recourir sereinement à la médiation: confidentialité, caractère libre et volontaire du processus, suspension des délais de prescription et déontologie pour le médiateur, le tout en tenant compte des obligations d’indépendance et d’impartialité.
« La médiation, pratique plus habituelle dans les conflits familiaux, devient de plus en plus privilégiée et ce dans plusieurs domaines », a relevé dans une déclaration à la MAP Driss Ajbali, médiateur de la MAP.
Si cette pratique demeure opaque pour le grand public, l’entreprise, notamment dans les pays développés, l’a largement adoptée et pas seulement, l’entreprise, les services publics, les organes de presse ou les agences, à l’instar de la MAP, en font désormais un argument de transparence et de modernité, a fait remarquer M. Ajbali.
Il a, dans ce sens, expliqué que les Etats, comme c’est le cas pour « le médiateur de la République » en France ou pour « Diwan Al Madalime » (remplacé par l’Institution du Médiateur du Royaume) au Maroc, mettent en place ce type de dispositif au service des administrés, dans l’intérêt non seulement de dénouer à l’amiable les conflits, mais également rétablir la confiance entre les médiés.
Interrogé sur les moyens à même de garantir la réussite d’un processus de médiation, M. Ajbali a souligné que la force d’une médiation suppose le volontarisme des parties en conflit, le professionnalisme du tiers, la gratuité de la démarche, la confidentialité et surtout le gain de temps.
« La démarche doit être courte. Ainsi, on peut éviter les aléas d’une procédure judiciaire qui, dans tous les cas, reste longue et coûteuse », a-t-il noté, faisant remarquer que ce n’est pas pour rien qu’en France, 48% des médiations entre entreprises sont proposées par le juge lui-même qui suspend le dossier en attendant l’éventuelle résolution du litige par le dialogue.
Et d’ajouter : « Si on prend l’exemple de la France, les entreprises ont à leur disposition un dispositif de médiation qui maille tout le territoire national. Il est composé de soixante médiateurs délégués dont 45 en régions. Les médiateurs sont généralement des professionnels formés à la médiation et sont pour la plupart des retraités, d’anciens chefs d’entreprises ou d’anciens juges de tribunaux administratifs. La démarche, une fois engagée, rencontre très peu d’échecs, c’est donc un moyen efficace ».
Médiation et Climat des affaires:
Dans le domaine de l’entreprise, la médiation ne peut qu’être objectivement efficace, a fait observer M. Ajbali, affirmant que « cela touche, le plus souvent des litiges qui concernent le non-respect des délais de paiement, avec notamment des incidences sur les trésoreries qui peuvent engager la santé des entreprises concernées. La médiation a fait les preuves de son efficacité. C’est dire que cette bonne pratique ne saurait être négligée par l’entrepreneur marocain! ».
M. Ajbali a, par ailleurs, souligné l’impératif de sensibiliser sur les multiples avantages de la médiation dont le désengorgement des tribunaux de commerces ou administratifs quand il s’agit des marchés publics. Le moyen le plus efficace, étant de la promouvoir par la loi aussi bien dans le code civil que dans le code du travail, le code de la consommation ou dans le code de la justice administrative.
Réussir un processus de médiation, comment ?
Contactée par la MAP, Rachida Ezaouia, à la tête du Centre de médiation et arbitrage de Casablanca (CMAC), a relevé que le Centre, adopte pour le bon déroulement du processus de la médiation, un règlement de Médiation et un code déontologique de Médiateur, afin de garantir, l’écoute personnalisée avec toute indépendance, impartialité, confidentialité, équité et neutralité.
« Il est nécessaire d’avoir des coûts et durées de la médiation maîtrisés, afin d’éviter des semaines de blocage avec des coûts financiers importants, en particulier avec des recours » a-t-elle souligné, notant que la rapidité qui caractérise le traitement des litiges commerciaux par le biais de la médiation permet avant tout, de créer un important climat des affaires, qui encourage les investissements en évitant le contentieux judiciaire et sa lourdeur.
Agissant en qualité de « tribunal privé » spécialisé dans les affaires commerciales, le CMAC, a-t-elle poursuivi, se présente comme la place idéale pour la résolution des litiges nés ou à naître dans le milieu des affaires entre commerçants, personnes physiques ou morales et offre aux entreprises un espace de gestion des conflits clair, transparent et professionnel.
Selon Mme Ezaouia, le développement de la médiation au Maroc, se base essentiellement sur l’amélioration de la prestation des services Médiation, conciliation, arbitrage, négociation (MARC), tels que la formation des médiateurs et l’appui aux prestataires de ces services, faisant savoir que depuis 2010, le CMAC de Casablanca-Settat, a pris l’initiative en partenariat avec l’Institut de Formation à la médiation et à la négociation (IFOMENE) de mettre en place une formation qui qualifie les médiateurs d’entreprises, en vue d’offrir une meilleure qualité de prestation et d’écoute, d’impartialité par rapport aux parties.
Et de soutenir « Ces Médiateurs ont un rôle singulier, non seulement ils favorisent le règlement des différends mais ils contribuent également à les prévenir ».
Il s’agit, également, de favoriser la demande aux MARC, notamment à travers des efforts de sensibilisation et de communication auprès des entreprises et juristes pour encourager le recours à la médiation, en plus de fournir de l’appui au niveau des décideurs politiques concernant la médiation.
Force est de constater que la médiation, se présente de plus en plus comme un levier à même de renforcer le vivre ensemble et le dialogue interculturel, défendre et construire de nouveaux droits en plus de fluidifier les relations commerciales, néanmoins celle-ci ne connaîtra un réel essor qu’à la condition d’un changement de mentalités. Il convient donc de passer d’une culture de l’affrontement à celle du compromis !