Les transferts de fonds effectués par les Marocains résidant à l’étranger (MRE) continuent d’afficher une forte résilience, malgré un contexte économique mondial difficile, toujours marqué par les répercussions de la crise sanitaire du Covid-19.
Une résilience qui est confirmée par les chiffres de l’Office des changes qui font état d’une nette hausse de ces transferts de 41,8% au titre des trois premiers mois de cette année, passant de 14,73 milliards de dirhams (MMDH) à fin mars 2020 à plus de 20,89 MMDH au 1er trimestre 2021. Ces envois de fonds des MRE dépassent même leur niveau d’avant crise (15,1 MMDH au T1-2019).
Cette augmentation soutenue témoigne de l’esprit de solidarité de la diaspora marocaine qui, malgré la crise et ses multiples contraintes, s’est efforcée pour maintenir son rythme d’envoi de fonds.
D’après Younes Chebihi, enseignant à l’Université de Bordeaux et membre du Laboratoire français de recherche en économie et finance internationale (LAREFI), trois hypothèses pourraient expliquer cette performance.
« Premièrement, le caractère permanent et fréquent de ces transferts en raison de la proximité familiale qui existe entre les expéditeurs et les bénéficiaires de ces fonds. En effet, selon une étude de Bank Al-Maghrib (BAM) et de la Banque Mondiale (BM), 83% des bénéficiaires interrogées sont des membres de la famille proche des expéditeurs », a expliqué M. Chebihi.
Deuxièmement, la fermeture des commerces et des lieux de loisirs dans les pays émetteurs a pu engendrer une baisse de la part du revenu réservée à la consommation au profit de la part envoyée aux proches dans le pays d’origine, a fait remarquer le chercheur en économétrie et analyse des politiques économiques.
S’agissant de la troisième hypothèse, elle porte sur l’arrêt de la circulation des personnes, causé par la fermeture des frontières extérieures et qui a probablement contribué au recul des canaux de transferts informels au profit des canaux formels, a-t-il relevé, indiquant que cette hypothèse est défendue par la banque mondiale dans son rapport intitulé: « Migration and Development Brief 34 ».
Quid des perspectives ?
Force est de constater que la poursuite de la hausse des transferts des MRE demeure dépendante de la relance économique dans les pays d’accueil et par conséquent, de la situation épidémiologique qui est toujours entourée par quelques incertitudes, en particulier avec l’apparition de nouveaux variants.
A cet égard, M. Chebihi a noté que « bien qu’il soit peu probable que la croissance des transferts MRE se maintienne au même niveau que le premier trimestre, ces derniers resteront résilients et continueront leur évolution pour enregistrer une augmentation annuelle de 7,1% en 2021 et 7,6 en 2022, selon les projections du Fonds monétaire international (FMI) ».
Parallèlement, Bank Al-Maghrib (BAM) avait révisé à la hausse, lors de sa 1ère réunion trimestrielle de cette année, ses prévisions relatives aux transferts des MRE.
En effet, la Banque centrale prévoit qu’après accroissement de 5% à 68 MMDH en 2020, ces transferts atteindraient 71,9 MMDH en 2021, puis 73,4 MMDH en 2022.
Par ailleurs, M. Chebihi a souligné l’importance d’améliorer la capacité du Royaume à attirer ces fonds en les intégrant dans le circuit financier. « Cela passe par l’inclusion financière et la généralisation des instruments permettant la baisse des coûts, à l’image du Mobile Banking », a-t-il précisé.
Il existe des initiatives de la sorte qui voient le jour au Maroc et qui contribueront sans doute à améliorer les services financiers offerts à la diaspora marocaine à même de booster les transferts des MRE dans les années à venir.
L’exemple phare de ces services est celui du lancement récent de la plateforme internationale de transfert d’argent via application « Taptap Send » dans le Royaume pour permettre aux MRE de transférer de l’argent à leurs familles au Maroc depuis leur smartphone, sans faire la queue dans une agence et sans frais fixe.
Ce service, initié en partenariat avec Cash Plus, se veut une solution efficace aux coûts « exorbitants » dont souffrent les MRE pour effectuer leurs transferts.
En outre, la réglementation des changes au Maroc offre plusieurs facilités et avantages aux personnes physiques marocaines résidentes à l’étranger. Il s’agit de l’ouverture des comptes, des crédits et cautions bancaires, ainsi que des investissements en devises dans le Royaume.