Des affrontements ont éclaté, jeudi soir à Boumerdès (52 km à l’Est d’Alger), entre la police algérienne et des manifestants, descendus dans la rue pour exprimer leur colère et leur indignation suite à la vague d’interpellations qui a visé des figures du hirak.
Selon des sources médiatiques locales, la ville de Naciria, à l’extrême est de Boumerdès était le théâtre de violentes échauffourées entre des groupes de jeunes et les forces de l’ordre.
Les affrontements ont éclaté après que la police ait stoppé la marche de protestation à laquelle ont pris part des centaines d’Algériens pour exiger la libération de deux figures du Hirak dans cette région en l’occurrence Brahim Agraniou et Ali Bengana.
Le premier a été arrêté vendredi dernier à Alger tandis que le second a été interpelé par les forces de sécurité le 27 mai devant son domicile.
Les affrontements ont éclaté après une bousculade devant le commissariat où des policiers s’étaient déployés pour empêcher la manifestation. Aux bombes de gaz lacrymogène, les manifestants ont riposté par des jets de pierres.
Selon des témoins oculaires cités par les médias algériens, les fumées épaisses des pneus brûlés et des gaz lacrymogènes ont rendu l’air irrespirable dans plusieurs zones de cette ville.
« Il y a 13 jeunes de notre localité qui sont poursuivis en justice pour leur engagement dans le hirak. La répression doit cesser. Les émeutes de ce soir sont le résultat d’une politique dangereuse qui ouvre la voie à toutes les dérives. Notre commune en a beaucoup souffert », ont précisé les mêmes sources.
Cette marche a été précédée par une grève des commerçants qui a duré deux heures. Les affrontements entre les jeunes et les policiers sont monnaie courante dans cette localité qui accuse un énorme retard en termes de développement et où le taux de chômage bat tous les records.
D’après le vice-président de la Ligue Algérienne de défense des Droits Humains (LADDH), Saïd Salhi, plus de 2.000 manifestants ont été interpellés en 12 jours en Algérie, dont près d’une centaine ont été placés en garde à vue et une soixantaine sous mandat de dépôt.
Tout en dénonçant la poursuite de « l’escalade de la répression » depuis le 117ème vendredi » (14 mai) du mouvement de protestation pacifique, il a fait état de 175 détenus d’opinion en 3 mois depuis la grâce du président Tebboune en février passé.
Il a qualifié la situation d' »inquiétante », faisant savoir que rien que vendredi dernier il y a eu au total près de 800 interpellations dans 15 wilayas sur 58.
Il s’agit d’un record d’interpellations rarement égalé durant ces 20 dernières années, dénoncent un grand nombre d’organisations de défense des droits humains, qui rappellent qu’il faut revenir jusqu’aux épisodes sinistres de la décennie noire des années 90 pour retrouver des chiffres ou des bilans aussi similaires en matière de répression sécuritaire.
Depuis le début du soulèvement populaire contre le régime, le 22 février 2019, le placement en détention de militants, d’activistes, de journalistes et de manifestants du Hirak n’a pas atteint une aussi inquiétante situation.
Le Comité National pour la libération de détenus a répertorié 174 détenus jusqu’au 25 mai 2021, emprisonnés pour leur opinion politique sur les réseaux sociaux ou lors des manifestations pacifiques du mardi ou vendredi.
Les détenus d’opinion sont répartis sur 30 wilayas, dont la grande partie se trouve à Alger (70 détenus).