La « e-logistique », concept principalement associé aux activités du e-commerce, ne cesse de prendre de l’ampleur au Maroc, particulièrement durant cette période de crise sanitaire liée à la pandémie du nouveau coronavirus.
Contacté par la MAP, le ministère de l’Équipement, du transport, de la logistique et de l’eau revient sur cette forte montée en puissance de la « e-logistique », la place qu’occupe cette dernière dans la stratégie nationale de développement de la compétitivité logistique, ainsi que ses perspectives.
– Comment s’explique la forte montée en puissance de la « e-logistique » au Maroc ?
Le développement de la « e-logistique » au Maroc émane de plusieurs évolutions qui ont bouleversé le secteur de la logistique et ont induit des impératifs de mutation et d’adaptation structurelles au niveau de la prestation logistique.
Le développement de la « e-logistique » est principalement associé à l’essor de l’e-commerce, qui ne cesse de poursuivre son progrès au Maroc depuis des années. Selon le classement international 2018 de la Conférence des Nations Unies sur le Commerce et le Développement (CNUCED), basé sur l’indice du commerce électronique d’entreprise à consommateur (B2C), le Maroc se hisse au 5e rang derrière d’autres pays comme le Nigeria et l’Afrique du Sud, en matière de taille de marché de l’e-commerce.
Cette montée en puissance de l’e-commerce est confortée, également, par plusieurs facteurs. D’une part, les nouvelles formes de la logistique de distribution (stocks et volumes réduits, livraisons au détail et à fréquences élevées, raccourcissement des cycles de vie des produits, logistique du dernier kilomètre, gestion des retours, etc) et d’autre part, par les changements dans les habitudes de consommation et des pratiques d’achats (consommateurs de plus en plus exigeants, commande au détail/à l’unité, achats en ligne, le « click and collect », etc).
A ce titre, l’activité des achats en ligne des Marocains a enregistré une progression de 41,4% en nombre d’opérations (soit 9.7 millions de transactions), et de 28,1% en montant (soit 4,1 milliards de dirhams) sur les 9 premiers mois de 2020 comparé à fin septembre 2019.
Face à ces nouveaux enjeux du commerce électronique, la « e-logistique » vient apporter les réponses aux exigences en matière de flexibilité et d’agilité. Elle présente également des options très variées en termes d’externalisation, de diversification des modes de livraison et de systèmes d’information (digitalisation, dématérialisation et traçabilité).
L’émergence et la généralisation de l’utilisation des nouvelles technologies et la transformation digitale constituent de réelles opportunités pour accélérer la croissance et le développement économique.
Le secteur de la logistique se place, de par son interaction avec la majorité des stratégies sectorielles du Royaume, au cœur de cette dynamique et se voit contraint d’emprunter cette tendance notamment pour répondre au développement du e-commerce. La digitalisation n’est donc plus une option pour les opérateurs logistiques, mais une obligation en vue de s’adapter aux impératifs du marché particulièrement le commerce en ligne.
En effet, nous sommes actuellement tous témoins de l’explosion du commerce en ligne au niveau mondial et plus précisément au niveau national, ainsi que l’engouement des consommateurs aux modèles de livraisons innovants comme le « click & collect » en magasin ou dans des points de livraison.
Ce phénomène a davantage pris de l’ampleur compte-tenu du contexte récent imposé par la prolifération du Covid-19, et des mesures de confinement et de limitation de déplacements qui s’en sont suivies.
De ce fait, la logistique, facteur important de la réussite du e-commerce, se doit de s’inscrire dans cette spirale évolutive en s’intégrant dans les nouvelles technologies afin d’améliorer sa performance et sa compétitivité, notamment, à travers la réduction des délais, la gestion des retours et le respect des temps de livraison.
– Comment le ministère accompagne-t-il cette évolution ?
L’évolution de la « e-logistique » est forcément dépendante de 3 éléments clés: Le transport, l’infrastructure logistique et la digitalisation. En général, le ministère a toujours accordé une attention particulière à l’accompagnement des différents acteurs et professionnels œuvrant dans le secteur du transport et de la logistique.
Ceci se traduit naturellement par la production et la mise à niveau permanente de l’arsenal juridique régissant le secteur en vue de lui permettre de suivre les différentes évolutions et mutations qui s’y opèrent voire même de les anticiper dans certains cas.
Néanmoins, le segment du transport sur lequel reposerait la « e-logistique » (moyens de transport de taille réduite, camion/fourgon, généralement inférieur à 3.5 tonnes) est caractérisé par une forte atomicité et une prolifération de l’informel, qui constituent une part non négligeable dans ce marché et échappe à la réglementation ou au contrôle.
Pour pallier à cet environnement réglementaire contraignant, le ministère a entamé une réflexion pour compléter et renforcer les aspects juridiques et opérationnels nécessaires pour assurer un meilleur accompagnement aux entreprises de transport opérant dans ce segment et pour l’intégration des nouvelles formes de la supply-chain dans la réglementation du secteur.
Un autre vecteur pour le succès de la « e-logistique » est l’accélération de la digitalisation et la dématérialisation. Dans ce sens, le ministère a amorcé plusieurs chantiers notamment la dématérialisation des procédures et des actes de transport dont ceux délivrés aux professionnels de transport de marchandises ainsi que la promotion du développement de bourses virtuelles de transport et logistique orientées distribution interne et sous-traitance.
La « e-logistique » est une réalité qui impose une adaptation de la supply-chain aux différents changements technologiques que connaît le secteur, ce qui pousse aujourd’hui les opérateurs logistiques à innover et à miser sur la rapidité et l’efficacité de leurs processus.
Pour les accompagner dans cette quête, le ministère s’est attelé, à travers l’Agence marocaine de développement de la logistique (AMDL), à mettre en place plusieurs actions visant la structuration et l’accompagnement des acteurs dans l’amélioration de leur performance logistique et ce, notamment à travers le programme « PME Logis » qui vise la mise à niveau des petites et moyennes entreprises (PME) marocaines.
En effet, une assistance technique et financière est offerte par le programme, dont notamment, le soutien à la digitalisation de la supply-chain et au déploiement des systèmes d’informations logistiques (WMS /TMS), le financement de ces projets par l’Etat dans le cadre de ce programme peut atteindre 74% du coût du projet.
En outre, afin de faire face à ces différents changements qui impactent les métiers de la supply-chain, de nouveaux emplois feront leur apparition conformément à ce contexte marqué par l’éruption des nouvelles technologies.
Dans ce sens, l’Etat œuvre pour le déploiement d’un plan national de formation dans les métiers de la logistique qui tient compte des aspects liés à la digitalisation et aux systèmes d’informations logistiques.
Dans le cadre de la stratégie de numérisation des ports et des efforts menés par la communauté portuaire sous l’impulsion de l’Agence nationale des ports (ANP), PortNet a lancé via son portail, un nouveau service électronique relatif à l’annonce des préavis d’arrivées des conteneurs aux ports destinés à l’export et ce, afin d’accélérer le transit portuaire et rendre les ports plus compétitifs.
– Quelle place occupe la e-logistique dans la stratégie nationale de développement de la compétitivité logistique ?
La stratégie nationale de développement de la compétitivité logistique prévoit le déploiement de nombreuses actions qui soutiennent le développement du secteur de la logistique de façon générale et qui contribuent à l’engouement du e-commerce au Maroc de façon spécifique, à savoir:
• La mise en place d’un réseau national de zones logistiques de massification des flux de marchandises dans des emplacements stratégiques à proximité des bassins de consommation et des zones de production, permettant un maximum de couverture spatiale en espaces ou relais de stockage favorable à l’élargissement des territoires desservis par l’e-commerce.
• L’encouragement à la digitalisation et à la modernisation des pratiques logistiques des entreprises marocaines et leur accompagnement technique et financier, en s’appuyant sur des mécanismes déjà mis en place, tels que le programme PME Logis.
• L’incitation à l’utilisation des nouvelles technologies de l’information et de la communication (NITC), à travers le déploiement du plan d’actions pour le développement de l’utilisation des plateformes de collaboration entre les chargeurs et les prestataires à l’instar des bourses de fret. • La mise en place de projets de simplification et de dématérialisation des procédures relatives à la gestion des flux import-export.
Enfin, le renforcement des compétences des acteurs du secteur de la logistique a pour objectifs de leur permettre de s’adapter aux besoins spécifiques du marché et à ses nouvelles tendances technologiques, de faire preuve de beaucoup de flexibilité et de faire face à des états de crises comme celui que l’on vit aujourd’hui.
– Quelles sont les perspectives dans ce domaine ?
Les perspectives de la « e-logistique » sont prometteuses dans la mesure où l’e-commerce qui a une étroite relation avec la « e-logistique », connait une croissance remarquable et durable dans le monde et au Maroc. Cette croissance implique un ensemble de préalables au niveau des chaines et des installations logistiques, qui doivent tenir compte d’un ensemble de spécificités de l’e-commerce liées notamment aux schémas et modèles de distribution (B2C), aux délais de livraison, à la traçabilité et à la gestion de la logistique inverse.