Bruxelles L’interminable saga de la formation d’un gouvernement fédéral, qui a tenu en haleine les Belges pendant près d’un an et demi, a connu en 2020 un dénouement heureux dans un contexte particulièrement difficile marqué par une crise sanitaire inédite.
Après avoir battu son record du nombre de jours (589) sans gouvernement fédéral de plein exercice, la Belgique a fini par faire triompher son célèbre sens du compromis. Mais que le chemin fût long !
Le 30 septembre, les Belges ont poussé un soupir de soulagement, après avoir assisté à un spectacle consternant qui a duré de longs mois, faisant entrer le pays dans le désarroi et la confusion.
Le facteur déterminant, qui aura fini par tout faire basculer, est inéluctablement la pandémie de coronavirus, venue concilier les positions divergentes et sonner l’heure de l’union politique dans un pays où le fossé communautaire ne cesse de se creuser.
Cette crise aux conséquences économiques et sociales désastreuses a poussé les différents protagonistes du paysage politique belge à transcender leurs différends et à mettre les bouchées doubles pour trouver un terrain d’entente, afin de faire face aux défis de taille imposés par la pandémie.
Suite à de longs mois de négociations gouvernementales, où les différentes formules de coalitions fédérales ont été passés en revue sans succès, confirmant la difficulté de parvenir à un consensus politique en Belgique, un ultime effort pour sortir de l’impasse politique a finalement donné ses fruits.
Si les différents « informateurs » et « préformateurs » nommés depuis le scrutin du 26 mai 2019 par le Roi Philippe pour prendre les initiatives permettant la formation d’un gouvernement se sont tous retrouvés dans l’impasse, ce n’est pas le cas du président du Parti socialiste francophone (PS), Paul Magnette, et du vice-Premier ministre Alexander De Croo (Parti libéral flamand-Open Vld) qui ont chapeauté les négociations ayant permis de boucler un accord gouvernemental pour la formation d’une coalition fédérale rassemblant autour d’une majorité la famille socialiste (PS-sp.a), la famille libérale (MR-Open VLD), la famille écologiste (Ecolo-Groen), complétée par l’appui du centriste flamand CD&V.
Cette coalition « Vivaldi » avec le libéral flamand Alexander De Coo aux commandes, a prêté serment le 1er octobre devant le Roi des Belges, mettant fin à une longue impasse et enterrant le spectre d’un retour aux urnes qui aurait compliqué davantage la donne politique au pays avec une montée en flèche de l’extrême droite dans le nord néerlandophone et un ancrage clairement à gauche dans le sud francophone.
A coup sûr, ce nouveau gouvernement sera attendu au tournant pour mener le pays à bon port, dans un contexte compliqué à bien des égards. Et il a d’emblée annoncé la couleur, précisant que ses priorités sont: Vaincre le coronavirus, faire redémarrer l’économie et relancer le pays.
S’agissant de la gestion de pandémie, qui a mis le pays à l’arrêt pendant plusieurs mois, le gouvernement De Croo met le paquet actuellement pour réussir la campagne de vaccination contre le coronavirus qui devrait débuter le 5 janvier prochain, avec l’espoir d’en finir avec cette crise sanitaire qui a déjà fait plus de 16.000 morts dans le pays.
Au volet économique, alors que les prochains mois devraient être marqués par des faillites en cascade et une forte hausse du chômage, le nouvel exécutif aura la lourde tâche de limiter les dégâts causés par la pandémie et stimuler une relance salvatrice.
Dans ce sens, le gouvernement compte mettre en place un plan de relance et d’investissement, en concertation avec les régions, communautés et pouvoirs locaux.
Doté de 4,7 milliards d’euros, ce plan de relance très attendu vise dans l’immédiat à résorber le choc économique engendré par la pandémie, par le biais d’un effort complémentaire pour renforcer la solvabilité et la liquidité des entreprises, malmenées par le confinement et par les incertitudes quant à la reprise économique.
A plus long terme, c’est à travers un surcroît d’investissements que le gouvernement belge ambitionne de relancer l’économie via un accroissement de l’activité économique et un maintien des revenus.
Pour ce qui est de l’emploi, le nouveau gouvernement fédéral belge a sur la table un plan d’action dont le but est d’atteindre un taux d’emploi de 80% à l’horizon 2030. Il vise également un allègement de la fiscalité des heures supplémentaires, ainsi que des « territoires zéro chômeur », qui sont des zones définies comme prioritaires, où les demandeurs d’emploi se voient offrir du travail ou une formation dans une entreprise créée pour les accueillir.
Dans un pays où l’éclatement des niveaux de pouvoir entre le fédéral, les régions et les communautés crée souvent la confusion et complique le processus de prise de décision, le gouvernement De Croo devra, en outre, se pencher sur la préparation d’une septième réforme de l’Etat, dans l’objectif d’avoir « une nouvelle structure de l’Etat belge à partir de 2024 » avec plus de pouvoirs aux entités fédérées, tout en gardant d’importantes attributions au fédéral.
Si 2020 a vu la Belgique se doter enfin d’un gouvernement fédéral de pleins pouvoirs, 2021 devra être l’année de la concrétisation des engagements pour restaurer la confiance des citoyens belges ébranlée par une succession de crises politiques.