
Par Imane Alaoui/ ALDAR
Plusieurs villes marocaines connaissent depuis quelques semaines une vague de manifestations menées par la jeunesse issue de ce qu’on appelle la “Génération Z”. Cette catégorie, née et élevée à l’ère du numérique et de la connexion instantanée, se distingue par sa capacité à se mobiliser à une vitesse fulgurante via les réseaux sociaux. Ces protestations s’inscrivent dans un contexte de montée des tensions sociales et économiques : flambée du coût de la vie, chômage persistant et sentiment d’exclusion d’une partie des jeunes du débat public et politique.
Bien que la plupart de ces rassemblements se soient déroulés pacifiquement, les autorités y ont opposé une réponse sécuritaire marquée par des interventions musclées et des arrestations visant plusieurs militants et manifestants.
Ce choix de la fermeté ravive un débat ancien au Maroc : la répression peut-elle réellement contenir la colère sociale ou ne fait-elle que repousser une explosion plus large ?
La réalité est que la “Génération Z” diffère profondément des générations précédentes, tant par ses outils que par ses attentes. Ces jeunes maîtrisent un langage numérique universel et comparent en temps réel leur situation à celle de leurs homologues à l’étranger, ce qui élève considérablement leurs exigences. De plus, leur mobilisation échappe aux cadres partisans et syndicaux traditionnels, rendant les mécanismes de contrôle de l’État beaucoup moins efficaces.
Les autorités misent sur une “solution sécuritaire” pour maîtriser la rue et éviter l’extension du mouvement à d’autres franges de la société. Mais l’expérience a montré, au Maroc comme ailleurs dans la région, que la répression ne résout pas les causes profondes de la crise. Elle peut apaiser temporairement les tensions, mais elle alimente à long terme un sentiment d’amertume et de défiance vis-à-vis des institutions, accroissant le risque de voir surgir de nouvelles vagues de colère plus virulentes.
Les véritables issues résident dans l’ouverture de canaux de dialogue sincères avec les jeunes, l’adoption de politiques publiques audacieuses pour améliorer leurs conditions de vie et leur implication effective dans la prise de décision. Car cette génération ne se satisfait plus de promesses abstraites : elle réclame des résultats tangibles, à la hauteur de sa dignité et de son droit à un avenir meilleur.
La leçon est claire : la répression ne crée pas la stabilité. La stabilité durable ne peut naître que de l’écoute des aspirations de la jeunesse, de la construction d’un lien de confiance et de la transformation de leur énergie contestataire en force de proposition et d’innovation. L’État a donc le choix : investir dans ce capital humain en tant que richesse nationale, ou continuer à le percevoir comme une menace, au risque de plonger le pays dans des cycles récurrents de tensions et d’incertitudes.