Les retards de paiement continuent d’affecter la santé des entreprises marocaines notamment les TPME. Ils ont pour effet de réduire les liquidités, d’accroître le niveau des créances douteuses et parfois même d’entraîner l’arrêt total d’activité.
S’ils ont reculé ces dernières années, notamment chez les établissements et entreprises publics (EEP), les délais de paiement restent quand même assez élevés entre entreprises. La moyenne des délais de paiement déclarés par l’ensemble des EEP a sensiblement baissé à 40 jours à fin décembre 2020 contre 144 jours en 2016 tandis que les retards de paiement entre entreprises, qui étaient déjà à un niveau alarmant avant la crise sanitaire, n’ont fait que se détériorer tout le long de cette année.
« Nous sommes passés de 408 milliards de dirhams (MMDH) liés à ces retards en 2018 à 421 MMDH en 2019. En l’absence de nouvelles commandes et de marchés en 2020, les entreprises se sont retrouvées en manque de liquidité et ainsi en grande difficulté pour régler leurs fournisseurs », avait déclaré le président de la Confédération générale des entreprises du Maroc (CGEM), Chakib Alj, lors de la 4ème réunion de l’Observatoire des délais de paiement (ODP) tenue récemment.
Citant les résultats de la 3ème édition du Baromètre de la CGEM réalisé en octobre dernier, il a indiqué que les délais ont connu une nouvelle hausse pour atteindre en moyenne 53 jours. Un constat qui est confirmé déjà par l’analyse préliminaire du 4ème baromètre lancé en janvier dernier.
Le chantier des délais de paiement est un sujet “vital” pour la TPME, d’où la nécessité de mettre en œuvre toutes les mesures à même de lui éviter une mort certaine, avait-il averti.
Sanctions pécuniaires pour dissuader les retardataires :
La dernière réunion de l’ODP a été marquée par la validation et la mise dans le circuit d’approbation du projet d’amendement de la loi n° 15-95 formant code de commerce, visant la mise en place du dispositif de sanctions pécuniaires à l’encontre des entreprises présentant des délais au-delà des limites réglementaires.
Il a été convenu à cette occasion que le produit des amendes sera dédié à l’appui des entreprises.
Une décision louable qui permettra de dissuader les entreprises “mauvais payeurs” et de protéger particulièrement les TPME qui souffrent énormément des retards de paiement.
Il s’agit en effet d’une pratique appliquée dans plusieurs pays du monde et qui a relativement montré son efficacité dans la lutte contre les retards de paiement qui seraient responsables de 40% des défaillances d’entreprises au Maroc et, corrélativement, de nombreuses pertes d’emplois.
L’Etat exemplaire, le privé à la traîne..
Les délais de paiement de l’Etat ont connu une évolution relativement importante qui a été enregistrée depuis le discours de SM le Roi du 20 août 2018.
Le délai moyen de paiement des marchés publics a été ramené de 144 jours en 2016 à 37 jours en 2019 avant de revenir à 40 jours l’année dernière. Un progrès notable à saluer même s’il y a des efforts encore à déployer notamment en ce qui concerne la maîtrise de la zone grise, qui est la durée entre le moment où le travail est fait et où la prestation est attestée.
Il convient aussi de rappeler les mesures instaurées en vue d’améliorer les délais de paiement. Il s’agit notamment de la publication régulière des délais de paiement des EEP et de la mise en place d’une plateforme de dépôt électronique des factures qui permet aux entreprises inscrites de déposer électroniquement leurs factures, lesquelles seront horodatées et signées électroniquement. Ce service a été lancé, depuis en 2019, pour les commandes publiques dont le montant est égal ou supérieur à 1 million de dirhams (MDH). Les commandes publiques dont le montant est supérieur ou égale à 200.000 DH sont soumises à l’obligation du dépôt électronique à partir du 1er janvier 2021.
Le ministère des finances a aussi procédé au lancement d’une plateforme électronique consacrée à la réception et au traitement des réclamations des fournisseurs concernant les délais de paiement de leurs prestations par les EEP.
Cette plateforme a été établie selon une approche participative impliquant les différentes parties prenantes notamment, la CGEM et les EEP. Elle vise à fluidifier les échanges et la communication entre les fournisseurs et les EEP, identifier les causes des retards de paiement, leur apporter les solutions adéquates et améliorer les délais de règlement des fournisseurs des EEP…
En dépit de ces efforts considérables, la lutte contre les retards de paiement reste tributaire d’une prise de conscience et d’une forte mobilisation de tous les acteurs concernés afin de pallier cette problématique qui pénalise particulièrement les TPME, qui constituent plus de 90% du tissu économique du pays.